Voici, comme chaque semaine, le culte en replay de ce dimanche.

Le pouvoir des mots

Glané dans le livre des Proverbes :

-La mort et la vie sont au pouvoir de la langue; Quiconque l’aime en mangera les fruits. 18:21

-Tel, qui parle légèrement, blesse comme un glaive; Mais la langue des sages apporte la guérison. 12:18

-La langue douce est un arbre de vie, Mais la langue perverse brise l’âme. 15:4

-Une réponse douce calme la fureur, Mais une parole dure excite la colère.15:1

Éphésiens 4:29 :

Qu’il ne sorte de votre bouche aucune parole mauvaise, mais, s’il y a lieu, quelque bonne parole, qui serve à l’édification et communique une grâce à ceux qui l’entendent.

Et dans la version « français courant » : 4 :29 – Qu’aucune parole mauvaise ne sorte de votre bouche; dites seulement des paroles utiles, qui répondent à un besoin et encouragent autrui, pour faire ainsi du bien à ceux qui vous entendent.

Prédication

Chers Amies, chers Amis,

C’est aujourd’hui la dernière fois que vous m’entendrez du haut de cette chaire. 

En effet, après cet été, je prends ma « retraite » de prédicatrice laïque.

Certains appellent une chaire d’église « chaire de vérité », ce qui est pour moi inacceptable, on peut tout au plus la qualifier de « chaire d’incitation à la recherche d’une vérité ». J’ai bien dit « une vérité », car elle n’est pas unique, car chacun étant unique doit être en recherche de la sienne et en tant que « chrétiens ouverts » par une approche historico-critique de la Bible et l’étude des enseignements de Jésus.

C’est donc la dernière fois que je prends la parole de cette manière, c’est pourquoi je voudrais aujourd’hui que nous méditions sur la parole, sur les paroles que nous entendons et que nous prononçons…

Les mots sont singulièrement la force la plus puissante dont dispose l’humanité. Nous pouvons choisir d’utiliser cette force de manière constructive avec des mots d’encouragement, ou de manière destructive avec des mots de désespoir. Les mots ont la force et le pouvoir d’aider, d’encourager, de rassurer, de guérir, ou d’entraver, blesser, nuire, humilier et rabaisser autrui.

Je me suis souvent demandé comment interpréter cette métaphore biblique en Genèse 1 : 26 « Puis Dieu dit : Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance » Serait-ce que nous sommes doués de parole, d’une parole créatrice, mais, selon l’usage que nous en faisons, elle peut être bonne ou mauvaise, créatrice ou destructrice?

Ce qui nous distingue du règne animal, c’est l’utilisation du langage symbolique. Notre capacité à traduire nos pensées en mots qui symbolisent des objets, nous permet de communiquer au-delà de la simple vocalisation. 

Beaucoup affirment que c’est le pouvoir d’intelligence des hommes qui est responsable de leur domination sur notre planète. Je crois  plutôt que c’est leur capacité à mettre leurs pensées en mots qui peuvent être communiqués aux autres.

Nous avons tous connu des personnes dont les paroles ont été mortifères pour ceux qui les ont reçues : parents, professeurs, hommes politiques, relations sociales ou autres.

Plus ce type de paroles négatives seront entendues à un jeune âge, surtout prononcées par des personnes qui ont une forme ou l’autre d’autorité, plus l’impact sera grand et destructeur, souvent sur le long terme.

Aujourd’hui, s’ajoute un autre moyen de faire circuler des paroles assassines :                        les réseaux sociaux. Internet occupe une grande place dans nos vies et particulièrement dans celle des ados. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : près de 96% des 12-18 ans utilisent internet en Belgique. Si les médias sociaux sont généralement utilisés de manière saine et responsable par la grande majorité des jeunes, et même des moins jeunes, certaines pratiques sont susceptibles d’engendrer des dommages importants. L’actualité nous en témoigne régulièrement dans divers domaines : en politique, dans le cadre de la pandémie et de la vaccination, dans des canulars alarmistes, des informations erronées ou fausses. Le cyber harcèlement est la pratique la plus grave. Des cas de suicides de jeunes, liés au cyber harcèlement, sont régulièrement relatés par la presse et mettent le public en émoi. Si la citation d’Horace : « Les paroles s’envolent, les écrits restent » est partiellement juste : je dis partiellement car des paroles peuvent être gravées dans les cœurs et ressassées sans cesse, mais le jeune qui reçoit des paroles meurtrières, avec tous les commentaires qui les renforcent, seul devant son écran, peut les lire et les relire. C’est ce qui peut mener aux drames que nous connaissons.

Les mots ont le pouvoir de changer les destins, le nôtre et celui des autres. Fréquemment, nous lançons des mots en plaisantant ou peut-être sous le coup de de l’énervement ou de la colère, des mots qui blessent et créent des dommages durables. Si nous comprenions la gravité de ce que nous disons, nous ne le dirions peut-être jamais. Les mots ont un pouvoir et une énergie que nous transmettons dans l’esprit et les pensées de nos enfants, de nos élèves, de nos amis, de nos compagnons, de nos pairs et de nos collègues. En plus, si nous occupons une position de leadership où nos mots exercent une certaine domination, nous devons être doublement prudents et attentifs. Si nous devions manipuler une bombe qui pourrait exploser à tout moment à la suite de nos actions, nous ferions attention et serions délicats. Nos mots ont le même pouvoir et pourtant nous les utilisons comme s’ils étaient anodins et sans effet.

La solution est la prise de conscience. Une fois que nous aurons pris conscience que nos mots sont ce qui nous distingue du règne animal, nous pourrons envisager de les utiliser avec plus de conscience et d’attention. 

Et si vous ne pensez pas que les mots ont un pouvoir, demandez à quelqu’un, à qui l’on a dit toute sa vie qu’il ne valait rien, quel impact ces paroles ont eu sur sa vie, ses choix sa confiance et son estime de soi.

Par la façon dont les dirigeants formulent leurs théories, ils peuvent avoir un impact considérable sur la vie de leur peuple pendant des générations. Souvent, la rhétorique est utilisée comme une arme qui crée des gouffres entre les gens. Ce ne sont pas nos préférences sexuelles, la couleur de notre peau, la langue que nous parlons ou la religion que nous pratiquons qui créent des frictions, de la haine et des guerres dans les sociétés. Ce sont nos mots et ceux de nos dirigeants, qui peuvent créer cette disparité. En tant qu’êtres humains, nous avons le don d’avoir une boussole morale. Si nous y réfléchissons, nous connaissons les mots qui ont un effet positif et ceux qui ont le pouvoir de détruire. Utilisons la parole comme outil de communication pour partager nos pensées afin d’impacter positivement notre entourage.

Ce doit être des mots d’émancipation. Des mots qui nous permettent de vivre nos vies au-delà du jugement et du reproche, des mots qui encouragent les gens à vivre leur vie avec dignité et fierté.

Chacun d’entre nous a la capacité de transformer sa vie et celle de son entourage en choisissant de prononcer des mots d’encouragement. Que vous vous considériez comme des libéraux, des sages, des érudits, des intellectuels, des théoriciens, des philosophes, des changeurs de paradigme, ou simplement comme des citoyens ordinaires, aidez le monde qui vous entoure en donnant aux gens les moyens de partager leur courage avec les autres. Il ne suffit pas d’influencer directement les personnes de votre entourage immédiat. Exprimez votre opinion. Donnez à ceux que vous rencontrez le pouvoir de donner à leur tour le pouvoir de défier la répression.

Mais ce qui est important pour nous, qui sommes ici ce matin, c’est l’écoute et la méditation de la Parole avec un grand P, celle que nous lisons et entendons commenter au moins le dimanche. On a recensé 126 versets bibliques relatifs à la langue, venant de 34 livres différents, dont certains mettent en garde sur le pouvoir et mauvais usage des mots et nous exhortent à nous en servir avec prudence et discernement.

Encore faut-il que cette Parole avec un grand P soit lue et interprétée avec discernement, car certaines paroles prêchées peuvent être dangereuses et destructrices quand elles sont proférées par des fondamentalistes.

Voici ce qu’en dit le théologien français Antoine Nouïs :

« Considérant le caractère infaillible de la Bible, les fondamentalistes refusent d’accepter la pluralité des récits, qui conduit à l’interprétation. Là réside la richesse des Écrits saints qui parlent à tous dans tous les temps.

Le fondamentalisme est la position de ceux pour qui la Bible doit être considérée comme un récit qui rapporte les faits tels qu’ils se sont déroulés, depuis la création du monde jusqu’à l’annonce du retour du Christ. 

Le terme est né aux États-Unis au début du vingtième siècle pour souligner les fondamentaux de la foi chrétienne en réaction à ce qui était considéré comme une dérive libérale. La liste de ces fondamentaux repose sur l’inerrance de la Bible, c’est-à-dire le fait qu’elle est la parole infaillible de Dieu. 

…Il est évident que les textes bibliques ne sont pas à mettre tous sur le même pied. Il y a plusieurs genres littéraires: poétique, narratif et philosophique.

Nous y trouvons:

-des récits et épopées militaires, des fables, des légendes, des généalogies.

Nous y trouvons:

-des textes de lois, des chants, psaumes, cantiques et poèmes.

Nous y trouvons:

-des dialogues, discours, prophéties, enseignements.

Nous y trouvons:

– des épîtres, lettres aux différentes églises, contenant des exposés doctrinaires, des recommandations d’ordre pratique, des hymnes, des confessions de foi et des doxologies.

Et aussi des écrits apocalyptiques: visions sur la fin des temps et liturgies célestes.

On constate également une évolution interne à la Bible elle-même.

Pour ne prendre qu’un exemple, la polygamie qui paraît tout-à-fait normale chez les Patriarches n’est plus de mise chez les Prophètes, et dans d’autres textes plus tardifs, qui prônent la monogamie et la fidélité à « la femme de sa jeunesse », pour reprendre l’expression biblique.

L’expression semble aller de pair avec la progression vers un monothéisme absolu.

Si aujourd’hui encore, les femmes devaient se taire dans les assemblées comme le recommandait l’apôtre Paul aux Corinthiens dans un contexte et à un temps particuliers, je ne serais pas là à vous parler ce matin…

On ne peut donc pas prendre la Bible au pied de lettre. 

Toutefois, je tiens à préciser…

Je tiens à préciser que le fondamentalisme n’est pas que protestant, ni même que religieux, qu’il peut revêtir de multiples formes, dans de multiples domaines, et qu’il faut s’en méfier.

Par contre, il y a aussi de ces paroles bibliques, et particulièrement des paroles de Jésus, qui nous accompagnent et nous nourrissent, qui nous guident et qui nous inspirent dans nos choix et dans nos attitudes au jour le jour…

Je voudrais partager avec vous certaines de ces paroles qui sont pour moi, comme dit le psalmiste,: « une lampe à mes pieds, une lumière sur mon chemin ».

*Dans les 10 paroles du Décalogue :

-Tu ne prononceras pas le nom du Seigneur ton Dieu en vain

-Tu ne diras pas de faux témoignage

*Dans l’Ecclésiaste : 

-…il y a un temps pour tout sous le soleil… et notamment… un temps pour se taire et un temps pour parler.

Et surtout ces paroles de Jésus :

*A la fin de la parabole du Bon Samaritain :

-Va et fais de même !

*Aux accusateurs de la femme adultère :

-Que celui qui n’a jamais péché, lui jette la première pierre

*Dans le sermon sur la montagne :

-Enlève d’abord la poutre de ton œil ; alors tu verras clair pour enlever la paille qui est dans l’œil de ton frère.

-A chaque jour suffit sa peine…

Et je termine avec un souhait, le souhait que le travail de prédicatrice laïque que j’ai accompli pendant plusieurs décennies aura permis, à ceux à qui je me suis adressée, d’utiliser le pouvoir des mots et des actions qui en découlent pour améliorer le vécu des personnes de leur entourage et de la société en général.                  Si mes paroles vous ont aidés de quelque manière que ce soit, ou si elles ont amélioré un tant soit peu votre situation, à l’une ou l’autre occasion, je souhaite qu’à votre tour, vous puissiez apporter à vos frères en humanité, quelles que soient leur origine et leur appartenance, des paroles et des mots constructifs, bienveillants et par-dessus tout, des paroles ouvertes, inclusives, accueillantes et libératrices.

Amen

daniel laenen

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